Lundi 11 janvier 1993, vers 4 heures 15 du matin, les pompiers arrivent sur les lieux d'un incendie à Prévessin-Moens, dans l'Ain à la frontière genevoise. La maison de la famille Romand est la proie des flammes. A l'intérieur de l'ancienne ferme ils découvrent les corps dans vie de Florence Romand qui présente des marques sur la tête et de ses deux enfants Antoine et Caroline âgés de cinq et sept ans, en partie carbonisés. Jean-Claude Romand est toujours vivant mais plongé dans un profond coma.
Le lendemain les gendarmes se rendent à Clairvaux-les-Lacs, dans le Jura, au domicile des parents de Jean-Claude Romand pour leur annoncer la triste nouvelle. Mais, sur place ils font une macabre découverte. Aimé et Anne-Marie Romand ainsi que leur chien ont été assassinés durant le week-end.Dans la BMW louée par Jean-Claude Romand, les enquêteurs trouvent un message : "Un banal accident et une injustice peuvent provoquer la folie. Pardon." Il ne fait alors plus aucun doute qu'il est l'auteur de cette tuerie.
La double vie du faux médecin
C'est en poursuivant leurs investigations que les gendarmes font une découverte stupéfiante. Contrairement à ce que pensaient tous ses proches il ne figure pas dans les listes du personnel de l'OMS; il n'a même jamais obtenu son diplôme de médecin. Son entourage tombe des nuées; particulièrement son meilleur ami, Marc Vital Durand, médecin de profession, qui ne s'est jamais douté de rien. Grâce à lui les enquêteurs parviennent à retracer l'incroyable parcours de Jean-Claude Romand.
Il débute ses études de médecine au milieu des années 70. C'est au cours de sa première année qu'il fait la connaissance de Florence qui deviendra sa femme en 1980. Son énorme mensonge débute à la suite de son échec à la fin de sa seconde année. Il fait croire à tout le monde qu'il a réussi mais se réinscrit en seconde année et continue à travailler comme si de rien n'était. Les gendarmes s'aperçoivent, en consultant les registres de l'université, qu'il s'est inscrit douze années consécutives en seconde année de médecine sans jamais passer l'examen de fin d'année.
Cependant ses connaissances en médecine sont pointues et actualisées à tel point que son épouse pharmacienne et son ami médecin n'y voient que du feu.
C'est ainsi qu'à la fin de ses prétendues études il s'installe dans l'Ain où il se dit chercheur pour le compte de l'organisation mondiale de la santé à Genève. Il participe même régulièrement à des colloques au sein de l'Association médicale du pays de Gex.
Les enquêteurs découvrent aussi l'origine de l'argent qui lui assure un train de vie digne d'un médecin. Dans un premier temps ses parents l'aident en lui versant un peu d'argent et en lui achetant un appartement qu'il revendra 300 000 francs. Puis son beau-père et ses oncles lui remettent diverses sommes en liquide pour qu'il les « place en Suisse ». En tout ce sont près de 2,5 millions de francs qui lui sont généreusement versés et qu'il dépense allègrement afin de protéger son mensonge.
Mais malgré ses généreux "mécènes" ses comptes bancaires sont pour la première fois depuis dix ans débiteurs. Son incroyable mensonge va être découvert et il ne le supporte pas.
Une sixième victime épargnée
En tentant de reconstituer le parcours du suspect au cours du week-end du 9 et 10 janvier 1993, les gendarmes sont mis sur la piste d'une femme mariée, elle aussi membre du corps médical, qui entretient depuis quatre ans une liaison extra conjugale avec Jean-Claude Romand. Chantal D. leur déclare que le samedi 9 janvier dans la soirée il s'est rendu à Paris pour la retrouver. Prétextant une invitation à dîner, il l'emmène dans la forêt de Fontainebleau où il l'asperge de gaz lacrymogène mais renonce finalement à la tuer. Choquée par cette agression elle n'alerte toutefois pas les forces de l'ordre et lui conseille d'aller consulter un psychiatre.
Peu à peu remis de ses blessures, Romand se voit notifier le 21 janvier 1993 sur son lit d'hôpital, son inculpation pour le meurtre des cinq membres de sa famille.
Le procès
Le 25 juin 1996 débute le procès du faux médecin affabulateur à la cour d'assises de l'Ain. Plutôt que d'établir la responsabilité de Jean-Claude Romand dans ce drame qui ne fait aucun doute, la cour tente de comprendre les véritables raisons de cet acte insensé.
Au troisième jour des débats, l'accusé se livre à une éprouvante confession au cours de laquelle il détaille le récit du meurtre de ses deux enfants, de sa femme et de ses parents.
La terrible confession
En ce samedi 9 janvier 1993, les enfants regardent une cassette de dessins animés au salon. Il leur demande de monter à l'étage avec lui, va chercher sa carabine et les abat chacun leur tour sur leur lit. Lorsque la présidente lui demande de décrire le meurtre de sa femme qu'il a tué avant ses enfants il répond qu'il ne se souvient plus de rien:
« La dernière image, c'est Florence à côté de moi qui téléphonait. L'image suivante, c'est moi, le rouleau à pâtisserie dans la main et le sang... ».
Ensuite après le meurtre de sa femme et ses enfants il raconte s'être rendu à Clairvaux-les-Lacs. Là, après un déjeuner avec ses parents, il attire son père au premier et le tue de deux balles de carabine avant de faire subir le même sort à sa mère. Enfin, il tue le chien, un labrador pour, selon lui, "l'envoyer auprès de sa fille" qui l'adorait.
Il n'a pour seule explication de ce quintuple meurtre, "la peur de décevoir". Il affirme avoir voulu épargner à sa famille la déception de découvrir qu'il n'était qu'un affabulateur.
Le long monologue de Jean-Claude Romand est interrompu lorsqu'il craque et entre dans une violente crise de nerfs.
A la reprise de l'audience, il explique qu'après le meurtre de ses proches, il se rend à Paris pour retrouver Chantal, sa maîtresse. Vers 23 heures, alors qu'il se trouve avec elle en forêt de Rambouillet, il fait mine de se perdre, arrête sa voiture pour chercher quelque chose dans le coffre, puis revient vers la jeune femme et l'asperge de gaz lacrymogène. Il la frappe ensuite au ventre avec une barre de fer.
Chantal le supplie de la laisser en vie et lorsqu'elle prononce le nom de ses enfants il a comme un choc et s'arrête net. Il s'excuse auprès d'elle et la raccompagne chez elle en lui racontant qu'il souffre d'une grave maladie.
De retour à Prévessin-Moëns dans la nuit, Jean-Claude Romand erre longtemps dans la maison où gisent les cadavres de son épouse et de ses deux enfants. Il reçoit un coup de fil de sa maîtresse qui lui conseille de consulter un psychiatre au plus vite. Le dimanche soir, vers 22 heures, il verse de l'essence dans le grenier, sur le lit de ses enfants et sur celui de son épouse. Peu avant 4 heures du matin, il absorbe une forte dose de barbiturique et allume l'incendie. La suite est connue.
Au terme des cinq jours de procès, personne ne peut expliquer les raisons d'une telle folie criminelle. Pas même les trois experts psychiatres qui peuvent seulement conclure qu'il était responsable de ses actes au moment des faits.
Le mardi 2 juillet 1996, le verdict tombe. Sans surprise Jean-Claude Romand est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une peine de sûreté de vingt-deux ans.
je suis de clairvaux les lacs et je peux vous dire que ca donne des frissons quand on passe devant cette maison tous les jours car elle se trouve à coté de l'école. moi je dis qu'il aurait du se donner la mort et laisser vivre sa famille car aujourd'hui c'est lui qui vit dans la réalité.
Rédigé par : kathy | 06 juillet 2011 à 19:25
"L'homme est un gouffre - on a le vertige si l'on y regarde!" (Georg Büchner dans "La mort de Danton"
Rédigé par : Wolfgang Weisbrod | 07 mars 2011 à 11:28
Après avoir vu le film "L'adversaire" que j'avais raté au cinéma (alors que j'ai lu l'excellent livre d'Emmanuel Carrère à sa sortie), en dépit de la qualité d'interprétation de l'ensemble des acteurs, je trouve que le côté narcissique pervers de l'individu Romand (et donc manipulateur) ainsi que son côté complexé par un physique banal à l'excès ne ressortent guère... pour ne pas dire "pas du tout". Pour ce qui est de la personnalité de Romand, qui a dû déjà construire une histoire invraisemblable pour convaincre celle qu'il aimait (ou convoitait ?) de l'épouser, c'est à mon sens la banalité surjouée de son personnage bonnasse qui a permis à un entourage confiant d'accréditer des mensonges si énormes qu'ils ne pouvaient en être... Ce qui semble effrayant est qu'un tel personnage qui, je pense, prétend avoir découvert la foi... va probablement bientôt sortir de prison... quel rôle s'apprête-t-il à jouer désormais et quelles nouvelles victimes tomberont-elles sous ses balles ou ses coups ?
Face à l'horreur de ses crimes, sa fausse tentative de suicide montre qu'il s'est avant tout préservé lui. Car il n'avait qu'à se tirer une balle dans la bouche pour en finir. Je pense qu'il est d'un narcissisme pervers excessivement dangereux pour autrui, avec toute la compassion envers lui-même que cela représente.
Je plains la famille de celle qui eut le malheur d'être sa femme, ainsi que la famille de ses malheureux parents.
Je regrette que pour ces cas exceptionnellement monstrueux la peine de mort ait été abolie.
Rédigé par : Fabdekar | 13 janvier 2011 à 23:57
c'est une histoire hallucinante pourquoi,
ne pas pas avoir fait un autre travail aussi
brillant qu'il pretendait faire tout en
continuant son mensonge. l'ireparable ne
serais peut etre jamais arriver
Rédigé par : bouhans | 11 septembre 2010 à 17:32
Dans la vie comme dans la mort, il n'est pas de mot qui vaille une éclairante explication...
Paradoxalement pourtant, c'est à cause des pires folies qu'un brin de lumière se fait au bout...
Du respect, pour tout ce qui nous dépasse!
Rédigé par : fidelio | 18 février 2009 à 15:17
Avant de lâcher un commentaire odieusement moralisateur, prenez soin de réviser vos leçons d'orthographe et de conjugaison. Merci.
Rédigé par : Boris | 24 juin 2008 à 12:40
Cet homme est éxtremement manipulateur, charmeur, et est un parfait comédiens. Il avait une voie toute tracé, il a préféré en choisir une autre, celle du mensonge, il a eu beaucoup de chance pendant 20 ans...
Il voulait ètre connu, c'est fait, il a plusieurs livres, un film à son sujet.
Il voulait se faire encore plus connaître en se suicidant, mais un homme politique s'est fait assassiné à sa place, il en perd la vedette.
Il ressortira de prison en ayant à priori moins de mensonges à raconter. Il aimait sa femme, ses enfants, ses parents, son chien, à tel point qu'il a préféré les tué... C'est ce qu'on appelle la Gloire ou connerie humaine...
Rédigé par : MP01 | 30 avril 2008 à 20:32
j'ai aussi lue le livre l'adversaire, et je trouve qu'il donne une vision atachante et " sympatique" du personnage qui est Jean Claude Romand. Pourtant se qu'il a fait ne nous refroidit vite. mais je tien a dire que c'est un trés bon livre.
Rédigé par : aude | 05 octobre 2007 à 20:26
J'ai lu "l'Adversaire" d'Emmanuel Carrère. Je trouve que cette histoire est glauque mais passionnante: comment peut-on réussir à mentir pendant 20 ans??!
Rédigé par : Elo | 29 août 2007 à 13:42
cet affaire est incroyable!
Rédigé par : Ramón | 26 juin 2007 à 01:22