Dimanche 22 juillet 2001: Karine Schaaff, une lycéenne de 17 ans circule à vélo sur une petite route de la zone industrielle de Bitche (Moselle). En ce chaud dimanche après-midi, elle étrenne le VTT que ses parents viennent de lui acheter en récompense de ses bons résultats au Bac français pour se rendre au domicile de son amie Mélanie. Il est environ 15 heures. Karine n'arrivera jamais à destination.
D'importants moyens terrestres et aériens sont rapidement déployés afin de retrouver au plus vite la jeune fille. Son VTT est retrouvé dans un fossé en bordure de route. A proximité de lui, les enquêteurs prélèvent des fragments d'optiques de phare. Selon un témoin qui circulait dans la zone industrielle en milieu d'après-midi, une Mazda de couleur claire aurait freiné de manière assez brutale avant de faire une marche arrière sur quelques dizaines de mètres puis serait reparti en trombe.
Pendant ce temps, la famille et les amis de Karine se mobilisent en créant un site internet et en imprimant des affiches avec sa photo. Pour autant les recherches n'en demeurent pas moins infructueuses.
Vendredi 27 juin 2001: Deux jeunes militaires déserteurs que l'on avait un temps soupçonnés d'être impliqués dans cette disparition se présentent spontanément à la gendarmerie d'Epinal (Vosges) et sont rapidement mis hors de cause. L'enquête s'oriente désormais vers la recherche du propriétaire d'une Mazda 323 immatriculée 57, les experts en automobile ayant identifié le type du véhicule à partir des fragments de phares prélevés sur le lieu de découverte du vélo de Karine Schaaff.
Mardi 31 juillet 2001: La thèse de l'enlèvement avec préméditation est désormais privilégiée par les gendarmes après la découverte de traces de gaz paralysant ou lacrymogène dans la matière poreuse de la selle du VTT accidenté.
Mercredi 1er août 2001: Dans la soirée, Stéphane Krauth, un jeune intérimaire de 23 ans est placé en garde à vue. Il est propriétaire d'une Mazda 323 blanche sur laquelle les gendarmes relèvent des traces suspectes sur le pare-choc avant et constatent que ses quatre pneus ont été remplacés le 23 juillet, soit le lendemain de la disparition de Karine.
Jeudi 2 août 2001: Stéphane Krauth est présenté au juge d'instruction Vincent Raffray à Sarreguemines en fin de matinée. Après quelques heures d'interrogatoire, il reconnaît son implication dans la disparition de Karine mais précise qu'il s'agit d'un malheureux accident: "Je roulais vite, 120 km/h environ, et j’avais fumé du cannabis. J’ai entendu un bruit dans le virage, puis j’ai vu un corps voler, comme si la tête avait heurté l’aile avant droit. Je suis descendu de mon véhicule, j’ai tout de suite compris que la jeune femme était morte". Il explique ensuite avoir porté le corps dans sa voiture avec l'intention de l'emmener jusqu'à l'hôpital de Haguenau puis il aurait changé d'avis et pris la décision de le brûler en forêt.
Sur ses indications, les restes partiellement calcinés de Karine Schaaff sont retrouvés à 17 h 52 en forêt de Mouterhouse, à quelques kilomètres au sud de Bitche.
Un autre jeune homme prénommé Sébastien est également arrêté dans la soirée. Selon Stéphane Krauth, il était présent avec lui dans la voiture lorsque "l'accident" est survenu et ce serait lui qui aurait aspergé la lycéenne de gaz lacrymogène avant de la placer dans le coffre de la Mazda. Or après enquête, il s'avère que Sébastien souffre de troubles psychologiques et est placé sous tutelle et surtout qu'il ne pouvait pas être avec son "ami" Stéphane Krauth le dimanche 22 juillet puisqu'il participait à un tournoi de pétanque dans un village voisin.
Finalement, seul Stéphane Krauth est mis en examen pour enlèvement et séquestration suivie de mort et incarcéré à la prison de Metz-Queuleu.
Lundi 6 août 2001: Plus d'un millier de personnes sont réunies autour de l'église de Bitche pour les obsèques de Karine. A la mi-journée l'émotion et le recueillement ont totalement envahi la petite ville lorraine où tous les commerces sont fermés.
Mercredi 8 août 2001: Péroline Garino, 19 ans, l'amie de Stéphane Krauth avec qui elle vit à Mulhouse (Haut-Rhin) et a eu une petite fille âgée de 3 mois se confie à un journaliste du Républicain Lorrain. Dans cette interview elle contredit la thèse de l'accident avancée par son compagnon et explique que le jeune homme a l'habitude d'être de lui faire subir des violences. Voici quelques-unes de ses déclarations:
"C’est mon copain, j’arrive pas à le dénoncer. Mais entre le moment où il a percuté et brûlé Karine, je sais ce qu’il a fait, où il est allé, l’endroit où il a planqué les affaires de la jeune fille. Il faudra un jour que je soulage ma conscience. Faut d’abord que je me réhabitue à Bitche, au regard de tous ces gens qui me dévisagent".
"Il est rentré le soir à Mulhouse, il avait l’air très énervé. J’ai pas trop fait attention, j’étais trop contente de le revoir. Il m’a juste dit qu’il avait eu un accident avec un vélo. Plus tard, je suis descendue voir la voiture, le clignotant était cassé. Le lendemain, il a changé les quatre pneus. J’ai trouvé ça bizarre".
"On regardait la télé, j’ai dit à Stéphane : "Tu peux tout me dire, de toute façon je suis pas conne. Je préfère l’entendre de ta bouche. Il s’est tu".
"À chaque fois, il me disait un truc nouveau. Ça devenait louche, de plus en plus. Le mardi où les gendarmes sont venus le chercher à la maison [le 31 juillet], il m’a tout raconté. Il savait que les gendarmes rôdaient dans le secteur. C’est là qu’il m’a dit : "Je vais tout te sortir"".
Et peu après cette interview, la jeune femme se décide à aller tout raconter aux gendarmes avant de confirmer ses dires devant le juge d'instruction à Sarreguemines:
"Stéphane m’a dit que Karine était prise de convulsions mais vivante, quand il l’a embarquée. Durant le trajet, elle n’a pas arrêté d’implorer Stéph’ pour qu’il la ramène chez ses parents. Arrivé en forêt de Mouterhouse, il l’a sortie de la voiture. Je pense qu’il l’a violée. Ça ne m’étonnerait pas, il a tenté plusieurs fois de m’imposer des rapports alors que je voulais pas. D’ailleurs, le pantalon de Karine était à moitié baissé, lorsqu’on l’a retrouvée". Péroline explique ensuite que son compagnon aurait étranglé Karine avec la lanière de son sac à dos ce qui confirme les constatations du médecin légiste et se serait ensuite débarrassé de ses papiers, ses vêtements et ses bijoux.
Jeudi 9 août 2001: Après de si graves accusations portées contre lui, Stéphane Krauth est à nouveau entendu et donne une nouvelle version des évènements:
"Ce dimanche je suis allé "faire du rallye" sur la zone artisanale : J’avais bu et fumé, après avoir passé la nuit dans ma Mazda, sur un parking. J’avais ramené mon ami Sébastien à Bitche le samedi mais son appart était trop crad pour que j’y dorme. J’ai pris le virage à 120 km/h. J’ai vu soudain une forme et entendu un choc. Je suis descendu de la voiture, la jeune fille était prise de convulsions. Mon premier réflexe fut de la gazer, pour qu’elle ne me reconnaisse pas et ne puisse pas relever le numéro de ma plaque. Mais finalement, je me suis dit que je ne pouvais pas la laisser comme ça. Au bout de dix minutes de route, je n’ai plus senti son pouls, elle ne respirait plus, son coeur ne battait plus".
Dans cette seconde version, Stéphane Krauth raconte qu'il aurait ensuite dissimulé de corps de Karine avant de rejoindre Péroline à Mulhouse en début de soirée pour lui raconter ce qu'il venait de se passer. "Elle m’a dit qu’il fallait y retourner et faire disparaître le corps. Nous avons rempli d’essence plusieurs bouteilles d’eau minérale et j’ai repris le volant. Il était environ 2 heures du matin lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, où nous avons brûlé le corps. À l’aube, nous étions de retour à la maison".
Devant ces deux versions contradictoires, le juge n'a plus d'autre solution que d'organiser une confrontation entre Stéphane et Péroline.
Vendredi 17 août 2001: Après trois heures de confrontation dans le bureau du juge instructeur, Péroline Garino revient sur ses accusations de viol et de meurtre à l'encontre de son concubin et admet avoir participé à l'incinération de la victime dans la nuit du dimanche 22 juillet au lundi 23.
Lundi 20 août 2001: Interrogée seule, Péroline Garino change à nouveau sa version et confirme ses déclarations initiales. Stéphane Krauth aurait bien violé et tué la jeune lycéenne. Elle explique que la peur engendrée par la présence du père de son bébé à ses côtés l'aurait empêcher de dire la vérité.
Entre temps, Sébastien S. apprend aux enquêteurs que Stéphane Krauth lui aurait fait part, quelques jours avant le drame, de ses intentions d'agresser une jeune fille dans le but de lui voler de l'argent et de la violer.
Lundi 10 septembre 2001: Péroline Garino est mise en examen pour "modification de l’état des lieux d’un crime en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité" après avoir reconnu avoir elle-même vidé les bouteilles d'essence sur le corps de Karine avant d'y mettre le feu.
Mardi 11 septembre 2001: Aloyse N., un ouvrier spécialisé de 39 ans, fait une déposition à la gendarmerie qui va dans le sens de la présence d'un deuxième homme en compagnie de Krauth le jour de la disparition de Karine: "Ce dimanche [22 juillet 2001], vers 14h30, j’ai emprunté la route forestière qui rejoint la nationale 62 et qui débouche sur la voie d’accès menant à la zone artisanale (...). Là, j’ai aperçu une voiture arrêtée face à moi. Il s’agissait d’une Mazda blanche. La portière avant droite était ouverte et un individu qui se trouvait à environ 1,50m du véhicule faisait des signes. Il semblait engueuler quelqu’un dans la voiture, certainement le conducteur. Ensuite, l’individu en question est remonté dans le véhicule. Il était vêtu tout en noir et avait les cheveux courts. Le conducteur, lui, semblait se cacher derrière le volant afin de dissimuler son apparence (...). La voiture a démarré assez lentement en direction de Stockbron. Alors, j’ai aperçu à l’arrière une jeune fille d’une vingtaine d’années. Elle avait les cheveux mi-longs et portait une lanière en bandoulière, comme un sac à main. Elle paraissait triste et semblait avoir peur. Elle avait les yeux ouverts et ne m’a fait aucun signe".
Jeudi 15 novembre 2001: Le Procureur de la République de Sarreguemines rend public certains éléments du rapport d'autopsie. On y apprend notamment que les blessures relevées sur le corps de Karine ne sont pas compatibles avec la thèse de l'accident défendue par Stéphane Krauth: "les lésions observées sur le corps de la jeune fille n’ont pas pu entraîner la mort et elles ne correspondent en aucune façon aux lésions qu’aurait provoqué un accident à 100-120 km/h".
En revanche, compte tenu de la dégradation du corps au niveau des parties génitales, aucune conclusion n'a été possible quant à l'éventualité d'un viol. Toute juste sait-on que Karine Schaaff était déjà morte au moment de sa crémation.
Mercredi 20 février 2002: Les empreintes ADN de Péroline Garino et de Stéphane Krauth sont formellement identifiées sur l'un des deux préservatifs retrouvés par les gendarmes à proximité du lieu de crémation de Karine en forêt de Mouterhouse. Ceci confirme les dires du jeune intérimaire qui avait déclaré lors d'une audition avoir eu un rapport sexuel avec sa compagne le lundi 23 juillet 2001 au soir après s'être rendu une seconde fois en forêt pour y faire disparaitre certains indices.
Mai 2002: Les conclusions des experts psychiatres sont remises au juge d'instruction Vincent Raffray. Stéphane Krauth et Péroline Garino ne souffrent pas de pathologies mentales susceptibles de les soustraire à une sanction pénale. Ils seront donc jugés en cour d'assises.
Mercredi 5 juin 2002: Les expertises effectuées par les techniciens de l’Institut de recherches criminelles de la Gendarmerie Nationale (IRCGN) concluent que d'après les traces de freinages relevés sur les lieux de la collision, la Mazda de Stéphane Krauth roulait à une vitesse comprise en 30 et 40 km/h et non pas à 120 km/h comme il l'a toujours soutenu lors de ses auditions.
Jeudi 20 juin 2002: Une reconstitution est organisée sur les lieux de la disparition de Karine dans la zone industrielle de Bitche.
Vendredi 27 septembre 2002: Un second déplacement à Bitche est organisé par le juge d'instruction. Il s'agit essentiellement d'entendre Hans Fix, le patron allemand d'une entreprise implantée près du lieu de découverte du VTT de Karine. Ce dernier affirme avoir aperçu à plusieurs reprises "une voiture japonaise de couleur blanche" circuler à faible allure dans la zone industrielle le dimanche 22 juillet 2002 en début d'après-midi.
Jeudi 10 octobre 2002: Stéphane Krauth et Péroline Garino sont emmenés en forêt de Mouterhouse pour une reconstitution de la crémation du corps de Karine.
Mercredi 5 février 2003: Le juge Raffray notifie à Stéphane Krauth la fin de l'instruction au cours de laquelle il n'aura notamment pas pu établir si le jeune homme était accompagné d'un complice au moment de l'enlèvement de la jeune lycéenne.
Vendredi 15 octobre 2004: Le procès de Stéphane Krauth et de Péroline Garino s'ouvre sous haute protection policière devant la cour d'assises de la Moselle à Metz.
Vendredi 22 octobre 2004: Après une semaine de débats au cours desquels chacun est resté campé sur ses positions, Stéphane Krauth est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour "l’enlèvement suivi de mort" et le "viol" de Karine Schaaff. Péroline Garino, quant à elle, écope de 3 ans de prison pour "destruction de preuves". Les deux condamnés font immédiatement part de leur intention de faire appel de cette décision. Durant son retour en détention à la maison d'arrêt de Metz-Queuleu, Stéphane Krauth se montre particulièrement agité et doit être maîtrisé par plusieurs policiers. Selon lui, il aurait été passé à tabac par des CRS et des gardiens de prison. Version contredite pas ces derniers.
Vendredi 15 avril 2005: Péroline Garino accouche en prison de son troisième enfant né d'une troisième union avec un plombier au chômage. Souhaitant faire une demande de libération conditionnelle afin de rester près de son enfant, elle décide finalement de renoncer à son appel.
Vendredi 17 février 2006: En appel, Stéphane Krauth voit sa peine réduite à 30 ans de réclusion assortie d'une période de sûreté des deux tiers. Ce verdict plonge la famille Schaaff, complètement désespérée depuis la disparition de Karine, dans une immense colère. Edith Schaaff ira jusqu'à proférer des menaces de mort à l'encontre de l'assassin de sa fille.
Depuis, Edith Schaaff a créé une association "Les amis de Karine" destinée à lutter pour la prévention et la reconnaissance des victimes.
Source: Le Républicain Lorrain
Je suis en train de regarder cette émission à la tv. C'est très touchant et fachant!
Rédigé par : Dollydodi | 31 mars 2010 à 04:51
A voir absolument : "Faites entrer l'accusé!"
Rédigé par : Lou | 08 septembre 2009 à 22:11
Bizarre cette histoire ... ça me fait un peu penser à un épisode d'"Une Femme d'Honneur", "Lola, Lola" ...
Rédigé par : ADM | 04 août 2009 à 22:51
on passe de 22 juillet à 27 juin :/
Rédigé par : fab | 18 mars 2009 à 22:45